Sur cette propriété, nous avons dû intervenir dans le cadre de la rénovation d'un grand bassin d'aspect naturel -on le qualifiera ici de mare même s'il est étanchéifié par une bâche à bassins- et du système de lagunage qui était supposé le filtrer.
Véritable cas d'école, il peut servir d'exemple quant aux choses à ne pas faire en matière de lagunage, et aux pratiques peu scrupuleuses de certains professionnels, qui nuisent à notre image.
Bien que le concept fut bon, théoriquement bien proportionné sur le papier, et l'équipement technique (pompes, filtre UV, etc...) de qualité, la réalisation n'avait, et de loin, pas été à la hauteur.
Ainsi, l'étanchéité du lagunage n'était plus assurée depuis fort longtemps, sa bâche n'ayant non seulement pas été ancrée correctement dans le sol, ayant été coupée trop court, ou plutôt choisie trop courte, celle-ci ayant été "raboutée" par ses installateurs qui avaient collé différents morceaux de différentes qualités (EPDM, bâche PVC...) pour limiter les débordements. Pour maintenir le niveau au-dessus du sol, quelques parpaings soutenaient ladite bâche de ci, de là et empêchaient plus ou moins qu'elle ne s'effondre sous le poids de la pouzzolane chargée de plantes filtrantes.La diversité des plantes s'en trouva affectée, et ce qui avait été une jolie lagune variée ne se cantonnait plus qu'aux deux espèces les plus résistantes à la sécheresse, à savoir le roseau commun dans la partie la plus humide (parce que plus creuse !!!), et la salicaire pour le reste.
C'est notamment pour ces raisons que ce filtre planté n'était plus opérationnel, la mare perdant plusieurs dizaines de centimètres d'eau par jour si on cherchait à l'employer.
Malheureusement pour notre client, les malfaçons étaient telles que la seule solution consistait à démonter ce lagunage, et à le reconstruire intégralement, en concervant cependant toute la partie technique qui, elle, fonctionnait encore au sein d'un local technique conséquent et bien conçu.
Les bambous ayant franchi leur barrière anti-rhizomes ont perforé la bâche à plusieurs endroits
Les berges appauvries
La pouzzolane ôtée ne pouvant être réemployée pour le nouveau bassin filtrant, nous décidâmes de l'utiliser dans la mare, car celle-ci présentait aussi un certain nombre de soucis intrinsèques, notamment une attaque de rhizomes de bambous et un déssèchement de la végétation rivulaire du fait d'un défaut de conception et de fuites éparses (les bambous en assumant une part non négligeable). Des enrochements ponctuels et des plantations rendraient son naturel à cette mare initialement bien pensée d'un point de vue esthétique.
Bien nous prit de raisonner ainsi...
Au démontage du lagunage existant, nous pûmes constater que, contrairement à ce que les plans du prestataire intial stipulaient, celui-ci était d'une profondeur bien trop faible, et les drains amenant l'eau du bassin par en-dessous étaient pour beaucoup obstrués par les racines de roseaux. Pire! Certains drains avaient été écrasés lors du remplissage, et des réparations grotesques avaient été effectuées dans l'espoir de n'être jamais découvertes. On a, par exemple, pu voir une bouteille d'eau en plastique servir de tampon pour un tronçon de tuyau de drain trop court!
Tel qu'il avait été conçu, ce lagunage n'avait aucune chance de durer, et il était réellement miraculeux qu'il ait fonctionné 5 ans...
Mise au jour des drains existants
Drain apparemment écrasé au remplissage lors de l'installation initiale
Drain colmaté par des racines de roseau (Phragmites australis)
Pour pallier à cet imprévu très désagréable (le bassin de filtration devait être recreusé de deux fois sa hauteur pour que les drains soient préservés des racines!) nous choisîmes de conserver le même volume, mais sur une profondeur adaptée. Les doigts de fée d'un excellent terrassier permirent de gérer les importantes quantités de terre à déplacer sans que cela n'ait trop d'impact sur les aménagements existants -la tuyauterie d'arrivée d'eau en faisant partie.
Ceci impliquait quelques modifications par rapport à nos plans, et nous pêchâmes par excès de modestie en n'osant pas monter nos bordures trop haut, de peur que la rivière qui sert à faire retourner l'eau dans le bassin nous réservât elle aussi quelque surprise quant à son étanchéité*. Ceci s'avéra un mauvais choix stratégique qui se régla finalement au printemps par un réajustement de la hauteur des bords du lagunage et un petit curage de la rivière qui put à terme faire preuve d'un débit suffisant.
Le surplus de bâche que nous avions laissé comme une marge de sécurité dans cette éventualité nous fut donc précieux.
Mise en place de "l'araignée" de tuyaux de drainage et de la pouzzolane.La granulométrie de la couche la plus élevée sera plus fine.
Raccord entre la rivière et le lagunage
Reprise de la bâche pour réhausser le niveau, au printemps
(*Nous ne voulions pas refaire cette petite rivière à la fois par souci d'économie pour le client, mais aussi parce qu'elle était agréable, dessinée avec goût, qu'elle avait le mérite d'exister et qu'elle était apparemment exempte de fuite sur au moins 15 cm de profondeur)
En parallèle de notre intervention sur la "lagune maudite", nous reconstituâmes des berges correctes pour le bassin. Ceci impliqua, entre autres, que l'on construise (nous ne nous en sommes pas chargés) un muret plus stable que ne l'était la barrière anti-rhizomes supposée retenir les bambous, que l'on remodèle certains contours et que l'on crée des reliefs internes.
Déplacement des bambous surnuméraires et élimination des rhizomes dangereux
Travaux de modification des berges
Par ailleurs, un nouveau plan de plantation fut décidé, qui tenait compte des diverses modifications et de l'adaptation des essences aux goûts du propriétaire et conditions de culture.
Ah, si, j'oubliais...
Pour diverses raisons, toutes très valables, nous ne pûmes travailler en assec et donc vider la mare. Dans ces conditions, la moindre intervention sur la bâche devient compliquée, et un travail en-dessous constitue un effort collossal, même pour aménager une petite excavation d'un mètre carré à la manière d'un mineur de fond du XVème siècle. Un litre d'eau, c'est 1 kg de masse verticale; imaginez la poussée d'une mare sur chaque centimètre carré de bâche tendue sur toute sa surface, lorsque l'on creuse dessous...
Pour nous reposer, nous plaçâmes alors, encore, quelques roches à la main.
Quand nous êumes achevé de mettre en place nos différentes structures, l'hiver particulièrement mordant cet année-là vint emprisonner tout l'aménagement dans 50 cm de glace pendant quatre semaines polaires. Et mettre nos nerfs à l'épreuve, certaines plantations ayant été effectuées en toute fin d'automne, au mois de décembre.
Le fait de produire les plantes "à la dure" nous a assuré des pertes très limitées sur l'ensemble, qui ne se sont que très peu ressenties au printemps, d'autant que nous avons remplacé la plupart des végétaux qui n'avaient pas survécu dès les premiers beaux jours.
Nous plantâmes dès mars les plantes pour le lagunage, afin qu'elles s'implantent au plus vite et que le dispositif filtre à nouveau ce plan d'eau qui en avait besoin.
Au bout du compte, le résultat fut à la mesure de nos attentes et, comble de bonheur, de notre client! L'été qui a suivi les travaux, l'eau commençait à (re)devenir limpide, permettant d'apprécier à nouveau les carpes koï multicolores évoluant en bancs dans la mare.
La mare lors de l'été qui a suivi les travaux
Le lagunage 6 mois après sa plantation
L'eau s'éclaircissant progressivement en sortie de lagunage
Le ballet des carpes koïs, que l'on ne voyait presque plus
Petite série de "avant-après"
Av
ant
Ap
rès
La berge massacrée par les bambous
Avant
Après
Avant
Après
Nos jardinières en géotextile, et leur évolution en 6 mois
Avant
Après
L'entrée de la rivière et la sortie du lagunage
Avant
Après
La presqu'île de la tortue
Avant
Après (de plus près)
L'arrivée de l'eau en provenance du lagunage
Voici ce à quoi ressemble le lagunage aujourd'hui, quatre ans plus tard:
Et l'ensemble a conservé assez de son naturel pour qu'un couple de colverts décident d'y élire domicile au printemps, et que madame y ponde!
Et si vous voulez plus d'images de nos travaux, vous en trouverez d'autres ici